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Les Anciens du DESS CVIR sévissent encore
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8 janvier 2007

J'assume, tu assumes...

Suite à mon billet sur le "je", je reviens sur ce sujet à travers l'expression "j'assume".

Pour commencer, une petite histoire, un responsable d'un organisme éducatif, devait distribuer aux collèges de son secteurs des tableaux blancs interactifs. Il avait décidé (ou on avait décidé en haut lieu pour lui, je ne sais pas) d'accorder l'octroi de ces couteux équipements aux collèges qui aurait proposé des projets nécessitants ces outils (démarche de projet). Il avait donc défini les critères d'attributions, les avait probablement respectés et en avait fait abondament la communication (car on avait du le lui reprocher). Il avait agit en responsable (définition des critères, respects des critères, communication). Alors que je l'écoutais énoncer le problème à un collègue, il termine son propos par un "j'assume" définitif.

Que veut dire ce "j'assume" ? Pourquoi l'emploie-t-il alors qu'il vient de faire la preuve de sa responsabilité ? Pour élargir, pourquoi ce "j'assume" est-il devenu  la marque de fabrique du responsable ?

Pour moi ce "j'assume" ne signifie qu'une chose : "je fais ce que je veux et si vous n'êtes pas content, c'est pareil ! - Je n'ai pas de compte à rendre" ce qui va à l'encontre des paroles précédentes qui était la marque de sa responsabilité (on peut ne pas être d'accord avec lui mais on ne peut que lui reconnaître d'avoir fait un choix argumenté !)

Tout simplement, à mon avis, parce que ce responsable ne rend de compte qu'à sa hiérarchie et non à ses pairs, ni à ses clients. Hors il me semble que la responsabilité est aussi transversale.

Le "je" qu'il y a derrière ce "j'assume" est pour moi le "je" de l'enfant. Un "je" d'une liberté irraisonnée. Le "je" du "loup (chef) y es-tu ?".

A contrario, il ne vaut mieux pas s'entendre dire "tu assumes", car là, celui qui le dit, c'est le loup ! "Tu assumes" signifie quasiment toujours "répare tes erreurs dans les plus brefs délais, et tu sera privé de dessert, voir licencié !". Entendre cette phrase n'est quasiment jamais le constat de sa propre autonomie par un tiers, mais presque toujours l'expression du père fouettard face à une erreur constatée.

Le "je" de "j'assume" n'est pas un "je" libre et autonome, c'est un "je" irrationnellement libre et finalement peu autonome et donc peu responsable. Le "tu" de "tu assumes" est un esclave. Et souvent, il peut s'agir de la même personne, dans une situation de communication différente, mais toujours hiérarchique. Au sommet de la pyramide, un "Je" d'une absolue puissance, en bas, un "je" asservi.

En ce qui me concerne, je ne remets pas en cause la nécessité d'une hierarchie (qui est ce qui permet de faire fonctionner une structure, même et surtout sans confiance - cf. "le prix de la confiance), ce que je remets en cause, c'est que la responsabilité d'un individu se juge toujours hiérarchiquement et toujours dans le sens descendant. Elle n'est jamais transversale et encore moins ascendante.

Pour conclure, me revient cette phrase de Mopsos "des droits sans devoirs, ce sont des privilèges".

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Commentaires
R
tu as entèrement raison, mais la dualité persiste tout de même. Quand le responsable dit "j'assume", il est intimement persuadé de son "je" et voit rarement le jeu social que cela représente
B
Lorsque je dis "je" dans mon travail, ce n'est pas moi, BB, mais la représentante d'une institution pyramidale qui doit faire passer les ordres de sa hiérarchie. Selon moi, le 'je" dans le monde du travail est un faux "je" comme il l'est en littérature (ce qu'a démontré Philippe Lejeune dans "Le pacte autobiographique" avec la notion de pacte avec le lecteur). <br /> Et tout ceci pose le problème des blogs style Skyb.... où des ados ont remplacé leur journal intime par une publication publique. Mais qui cela intéresse-t-il vraiment ? <br /> Bref dans le monde du travail le "je" est un je de convenance, qui cache une fonction à laquelle l'individu ne peut être totalement assimilé, et dans la sphère privée, sur le net parfois, tout simplement un jeu pour expérimenter de nouveaux rapports avec autrui.
Les Anciens du DESS CVIR sévissent encore
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